vendredi 24 janvier 2014

Pompompéro !

32°01.581S 52°06.512W
Rio Grande do Sul, Brésil

Depuis le temps que je vous en parle, je me suis dit que de vivre en direct un vrai pampéro, serait un plus dans votre éducation, bande de lecteurs néophytes mais néanmoins attachants.
Alors voilà, ça dure huit minutes trente, c'est pas aussi spectaculaire que je l'aurais voulu, mais au moins vous aurez un aperçu de ce que ça peut donner. Enjoy ! *

(* Oui, je suis en mode nostalgie de l'anglais. Zoë me manque.)


lundi 20 janvier 2014

Première semaine au Brésil

32°01.581S 52°06.512W
Rio Grande do Sul, Brésil

Rio Grande do Sul un dimanche matin...
Voilà quelques jours maintenant que je profite de ma première escale brésilienne. Quelques jours que je récupère de ma fatigue, et que je m'organise pour la suite du voyage.

Récupérer, cela a été assez facile. Il m'a suffit pour cela d’enchaîner les gros dodos et de limiter mes déplacements au strict minimum alimentaire. Le Yacht Club de Rio Grande est un lieu idéal pour ça, tranquille, luxueux... Je sais très bien que ça va vite me gonfler d'être au milieu des privilégiés qui m'ignorent superbement, mais j'avoue que pour l'instant ça fait du bien et j'en profite éhontément. 

Le marché au poisson
Cela dit, après une année passée en Uruguay et en Argentine, le fait de retrouver le Brésil me fait du bien aussi... Entendons-nous bien, l'Uruguay reste pour l'instant en haut de ma liste pour l'ambiance générale, mais j'avoue que le Brésil c'est quand même quelque chose. C'est un peu comme si après un long séjour en France vous alliez faire un tour en Italie... Vous voyez ce que je veux dire ? C'est plus animé, plus bruyant, plus bordélique aussi. Les rues sentent la nourriture, les femmes sont plus grosses (pas toutes heureusement !), le portugais remplace le castechano et tout de suite ça chante un peu plus dans les oreilles. Les prix à la consommation sont plus bas aussi... Et bien sûr, top de chez top, il y fait enfin chaud tout le temps ! Je veux dire que je n'ai plus à me préoccuper de savoir comment me saper (short et torse nu!) et je peux sortir pisser la nuit en tenu d’Adam sans craindre de prendre froid à mes chers attributs. Et pourtant je ne me trouve qu'à 350 Km au Nord-Est de La Paloma !

Bref, comme j'ai chaud, je me sens mieux dans mon corps et ce mieux-être rejaillit sur mon moral. En plus, j'ai appris une bonne nouvelle deux jours après mon arrivée ; à savoir que la panne de mon moteur n'était pas si grave. En fait, et là je sens qu'on ne va pas se gêner de me traiter de crétin, il s'agissait tout simplement du filtre de gazole qui était encrassé... Et pourquoi il était encrassé hein ? Tout simplement parce que je ne l'ai jamais changé depuis mon départ ! 

Filtre à gazole
Voilà, maintenant que je vous ai tout dit, vous pouvez me vanner, je le mérite. (Mais allez-y mollo tout de même, car n'oubliez pas que j'aurais pu tout aussi bien vous raconter des bobards et vous dire par exemple que c'était la faute du gazole qui était de mauvaise qualité !)
Donc voilà. Ce weekend j'ai démonté le bordel, et aujourd'hui je vais essayer de trouver le filtre ad-hoc. Ensuite je n'aurais plus qu'à réamorcer le circuit d'admission comme un grand, et Mercedes devrait ronronner de nouveau comme une grosse chatte.

Concernant les autres trucs à revoir sur La Boiteuse, c'est un poil plus compliqué... En effet, Rio Grande est plutôt mal approvisionné en accastillage, et je vais sans doute devoir attendre avant de changer mes deux winchs. Par contre, pour ce qui est de l'hélice de mon hors bord, là il va falloir absolument que j'en trouve une car il se pourrait bien que mes prochaines escales soient clandestines, donc au mouillage. Et franchement, avoir un moteur au cul de son annexe c'est toujours mieux que de ramer comme un con. Enfin, pour ce qui est de mon foc... J'avais rendez-vous avec un type il y a trois jours et j'attends toujours qu'il daigne vouloir travailler. Je sens que je vais encore devoir utiliser mon sparadrap magique et faire ça moi-même...
Du rouge encore du rouge !
Voilà ! Vous savez tout ! Ah non, j'oubliais un truc. J'ai peint l'aérienne de mon régulateur ! Et franchement, ça a de la gueule ! Non ? Si quand même, c'est classe je trouve...

Parlons de Touline maintenant. Comme je l'ai précisé dans un de mes commentaires (voir article précédent), celle-ci n'a rien trouvé de mieux pour se rendre intéressante que de tomber à l'eau moins de cinq minute après notre arrivée ! J'ai entendu le plouf, mais j'ai cru que c'était un poisson qui sautait hors de l'eau. Ce n'est que dix ou quinze minutes plus tard que je l'ai récupéré miaulante accrochée à une échelle de bain. Entre temps, la Touline a trouvé le moyen de nager une trentaine de mètres le temps de trouver un bateau équipé pour pouvoir s'y accrocher. Touline, la chatte nageuse, en est donc à son trente-septième bain !

Nouveau territoire
Quoi d'autre ? Touline aussi profite à fond de son nouvel environnement. Des arbres, des oiseaux (le canard qui était là l'année dernière a disparu), du poisson pêché par Papa deux fois par jour... Elle se la coule douce autant que moi.

Voilà, vous savez tout ! Je voulais absolument terminer cet article pour que vous l'ayez dans vos boite aux lettres en ce lundi matin qui, parait-il, est plutôt frileux et mouilleux du côté de la France. Ici, il est presque neuf heures et le thermomètre indique qu'il fait déjà 30°C à l'intérieur de La Boiteuse. Je sais, je suis cruel.

Le mercado

Un petit bijou abandonné...
 
Fait chaud !

J'ai le droit de marquer mon territoire, non ?

mardi 14 janvier 2014

De La Paloma à Rio Grande do Sul

32°01.581S 52°06.512W
Rio Grande do Sul, Brésil

La samedi 12 janvier 2014 – Chaud devant !

Hasta luego !
09H30 : Je décolle doucement du muelle de La Paloma. Les copains sont là pour larguer les amarres et me souhaiter la bonne route. Il y a là Santiago, Marc, Gabriela... Ah Gabriela ! Je crois qu'elle restera un de mes meilleurs souvenirs de ces quelques semaines passées à La Paloma. Même si elles sont quelque part frustrantes, j'adore ces rencontres brèves, sincères et intenses qui me rappellent ma jeunesse et le temps des colonies de vacance. Ces lieux où l'on liait en peu de temps des liens si forts qu'on croyait qu'ils allaient durer toute la vie. On se promettait de garder le contact, de s'écrire... Et pourtant, tous ces visages se sont peu effacés de ma mémoire comme je suis sûr que le mien a disparu de la leur.
Mais les temps changent, aujourd'hui il y a Facebook !

10H00 : J'arrête Mercedes. 5,3 Nœuds, vent de travers. Deux ris dans la Grand-Voile et foc déroulé en grand. Cap au 65° sous un ciel bas. Avec le stress et la suée du départ, le vent me fait frissonner.
C'est parti pour 200 milles, avec un vent du sud annoncé de 20 à 25 Nœuds, virant et s'établissant à l'est demain dimanche. Je prévois deux jours de navigation, mais quelque chose me dit je vais sûrement arriver bien plus tôt.
Nous sommes partis à trois bateaux. Premier dehors, c'est tout de même moi qui prend la dernière place de la file. Les croiseurs rapides de 35 pieds, aux carènes de bateaux de course, m'en mettent plein la vue ! Qu'importe, on ne joue pas dans la même catégorie de toute façon...
La mer est moche du gris des nuages.

Ben alors ?
11H30 : Touline boude dans son coin, et miaule par intermittence sa réprobation. Elle a le mal de mer. Mais bon, je sais que ça va passer et que demain il faudra que je la surveille comme le lait sur le feu. On avance bien, à presque six nœuds. C'est cool. J'ai faim.

11H45 : Ça y est, ça commence à forcir. Je réduis mon foc de moitié. Le souci c'est que je suis tribord amure (le vent arrive de la droite), et que je dois border ma voile avec le winch cassé. C'est pas top, mais j'y arrive quand même. A défaut d'avoir les chevilles en bon état, j'ai encore des bras.
Ceci fait, je peux terminer mon sandwiche pain-beurre-mortadelle et je m'en fait même un deuxième.

12H00 : Je fais le point. Belle moyenne de 5,5 Nœuds. A ce rythme là j'arrive demain avant la tombée de la nuit. Le Cabo Polonio est à deux heures, après lui je vais pouvoir abattre de 15°. Ce sera un poil plus confortable...
Les bateaux argentins ont disparus derrière l'horizon.

14H00 : Je viens de doubler Cabo Polonio. J'aperçois pas mal d'otaries qui barbotent dans les vagues. Je sais qu'il y a une immense colonie qui squatte le cap. Dommage que je ne puisse pas m'approcher plus près pour les observer... Mais bon, on n'est pas là pour rigoler !
Il y a des creux de deux mètres et la houle est hyper-serrée. Bref, ça bouge pas mal et c'est pour ça que vous n'aurez pas de photos d'otaries batifolantes.
J'abats de 15° comme prévu, aussitôt La Boiteuse bondit dans les vagues et le loch affiche un glorieux 7 Nœuds de vitesse de croisière.

15H20 : Cela commence à ressembler à l'océan. La houle se creuse, les vagues déferlent à grand bruit... Touline dors. J'ai tenté de dormir moi aussi, en prévision de la nuit à venir, mais je n'y suis pas arrivé.

16H45 : Le vent forcit encore et tourne un peu à l'est ce qui fait que je me retrouve travers à la vague plus souvent qu'à mon tour. Il faudrait que je réduise un peu la voile d'avant, mais j'ai pas envie. 7,2 Nœuds depuis deux heures, avec des surfs à 10, c'est toujours ça de gagné sur la journée de demain. Allez ma Boiteuse ! Fonce !

16H50 : A regarder la pale aérienne de mon régulateur, je me dis que ça serait bien si je la peignait en rouge... Ok, je vais faire ça à l'escale de Rio Grande ! Ça sera à rajouter sur la liste des choses à faire, juste en dessous des winchs à changer et de la nouvelle hélice pour le moteur de Miss B.

17H00 : Et hop ! Une p'tite vidéo !


17H35 : Je repense aux conditions de mon départ... Sachez que j'ai longuement hésité avant que de me décider à prendre la mer. Hier matin, j'étais encore à tourner dans tous les sens, à discuter avec les uns et les autres pour peser le pour et le contre, mais surtout à tenter de trouver la motivation nécessaire pour partir. Car il s'agissait bien de ça, de motivation.
La fenêtre météo était bonne, enfin aussi bonne qu'elle puisse être dans ces régions. D'autres allaient l'emprunter en même temps que moi, ce qui était un plus question sécurité... Et en plus ils ne prévoyaient pas de pluie ! Et pourtant, j'ai faillis surseoir une énième fois.

Ce qui m'amène à réfléchir sur le pourquoi du comment. Pourquoi est-ce que je me faisais tirer l'oreille ainsi ?
Je n'ai pas de réponse définitive à cette question. La peur de prendre la mer ? Non, sans doute pas. Ce coin est particulièrement chiant c'est vrai, mais pas vraiment dangereux. La flemme peut-être... Pas envie de lâcher la proie pour l'ombre comme on dit. Préférer l'indolence du moment à hypothétique du futur. Sans parler que l'Uruguay est un pays génial et franchement, s'il n'y faisait pas si froid, il serait en haut de ma liste pour une immigration durable.
Mais bon, lorsque je me suis enfin décidé, toutes mes réticences se sont volatilisées comme par enchantement. Pouf ! Plus rien ! J'ai même ressenti une attirance renouvelée pour la découverte, les nouvelles rencontres et les nouveaux lieux à explorer !
Me voilà donc en route vers de nouvelles aventures, et La Boiteuse m'y emmène à une vitesse jamais égalée jusqu'à présent !

Alone with myself

19H10 : J'ai déjà réduis la voilure à l'avant car je dérivais un peu trop vers la terre... Mais je sens qu'il va falloir que je recommence ! Il y a de sacrées rafales à peut-être 30 Nœuds. Je n'ai pas souvenir d'avoir autant sollicité ma Boiteuse. D’habitude je calme le jeu bien plus tôt, me contenant de mes 4,5 Nœuds de moyenne, mais là je ne sais pas pourquoi je sens que ça va aller. Mais bon, il ne faudrait pas que je casse quelque chose quand même...
Voilà, c'est fait. Tout de suite ça va beaucoup mieux.

19H35 : Ah la vache ! Une déferlante plus grosse que les autres vient de coucher La Boiteuse sur bâbord ! J'ai faillis perde le panneau solaire ! Je ne sais pas combien de litres j'ai embarqué dans le cockpit, mais tout est trempé. Moi le premier.
Je crois que Touline a eu peur cette fois ci... Elle vient de se pelotonner dans mes bras pour un gros câlin.

20H10 : Ça devait baisser qu'ils disaient... Ouais, j'aimerais assez pour ma part, parce que là ça commence à piauler sérieux. Dans une heure je passe la frontière brésilienne... Fait chier, je pensais l'avoir suffisamment caler entre les coussins, mais mon cendrier marocain vient de voler à travers la cabine. Paix à son âme.

20H20 : Merde ! J'ai une déchirure qui commence à apparaître sur la bordure du foc !
Ok, j'ai enroulé la voile jusqu'à recouvrir le trou. Ça devrait tenir jusqu'à l'arrivée ou jusqu'à ce que ça se calme... Parce que là, franchement, je n'ai pas vraiment envie d'aller faire le clown sur le pont.

20H30 : J'aurais dû penser à réduire la voilure plus tôt... Parce que le bateau se comporte beaucoup mieux sans pour autant avoir perdu beaucoup de vitesse. Mais quel con je fais des fois !!! Ça fait trois heures que je me fais bringuebaler dans tous les sens, alors qu'il suffisait de... J'me mettrais des baffes, tien !

Fin de journée...
20H50 : La nuit tombe et ça chie de plus en plus. J'ai été obligé de lofer de 10°, sinon j'allais percuter la terre dans quelques heures. Résultat, je suis presque travers à la houle (4 mètres maintenant) et je me prends des paquets de mer dans la gueule.

21H05 : Tout est prêt pour que je passe la nuit allongé dans le cockpit. Au départ, j'avais dans l'idée de dormir à l'intérieur, mais c'est carrément pas le jour pour innover. C'est Touline qui ce soir sera au chaud et au sec !

Le dimanche 12 janvier 2014 – De Charybde en Scylla

06H35 : Bouh... Quelle nuit de merde mes enfants ! J'ai été secoué, essorer comme dans le tambour d'une machine à laver. Ça n'a pas arrêté de toute la nuit ! Il n'y a qu'aux toutes premières heures du jour que le vent et la mer ont semblé se calmer. Et encore, c'est très relatif.
Le principal souci de la nuit a été de faire gaffe à la côte, car pour la première fois je dérogeais à une de mes règles. A savoir : La nuit, jamais à moins de 10 milles des côtes.
Et là, j'ai longé celles-ci à 7 milles et à une vitesse de plus de six nœuds. Ça veut dire clairement qu'en cas de panne de réveil, je suis potentiellement sur la plage en une heure et des poussières. D'où un certain stress vous en conviendrez, et des plages de sommeil n’excédant pas 40 minutes.

C'est mieux...
Malgré tout, ça c'est bien passé. J'ai gardé un cap plus que correct et une vitesse de malade, sans rien casser et sans percuter quelque chose ! Et en plus, griotte sur le clafoutis, je n'ai même pas eu froid. Donc l'un dans l'autre, je suis content. Je vais faire le point à 08H00, mais à vue de nez je dirais qu'on devrait arriver sans problème à Rio Grande avant la nuit.

08H00 : 6 Nœuds de moyenne sur les douze dernières heures. C'est cool... Sauf que le fait d’être descendu à l’intérieur m'a rendu malade.

10H50 : J'ai dormi un peu et je me sens un peu mieux... Le vent ne souffle qu'à F4, mais l'état de la mer est toujours chaotique. J'ai perdu un peu de vitesse mais j'ai toujours l'impression de me faire essorer comme dans une lessiveuse.
Je pourrais dérouler un peu du foc pour renouer avec les six nœuds de croisière, mais j'ai peur qu'il ne se déchire. C'est pas grave, je suis quasiment assuré d'arriver à bon port avant la nuit.

12H00 : Burpl.... Dès que je me lève pour faire quelque chose, j'ai la nausée qui me reprend. Pourtant il faut bien que je jette un œil de temps en temps autour de moi, je commence à apercevoir quelques bateaux de pêche.

15H15 : Tien, un albatros ! J'aperçois également les grues du port de commerce. Allez mon bonhomme, sert les dents. Dans deux heures maxi, tu entâmes la remontée du fleuve. J'espère seulement qu'il y aura de la place parce que je n'ai pas vraiment envie de planter la pioche dans le bras du fleuve comme l'année dernière.

16H37 : Ça y est, j'ai franchis le passage de la jetée. Juste derrière un autre voilier que je n'arrive pas à reconnaître. Aurais-je réussi à rattraper l'un de mes prédécesseurs ?

C'est quoi ça ?
16H50 : Allumage du moteur. Aussitôt Touline saute de la couchette qu'elle squattait depuis le matin et se réfugie sur le capot de la descente. De là, elle observe les rochers, les autres bateaux, les bâtiments... Ça serait-y qu'on arrive des fois ?

17H30 : Putain, j'ai un souci là... Le moteur a calé et refuse de redémarrer.

17H45 : Je suis un peu dans la merde. Pour l'instant je remonte le fleuve à la voile, mais je vais tenir le mouillage prêt, au cas ou...

18H00 : Le bateau qui me précédait est inexplicablement sorti du chenal et vient de s'échouer sur un banc de sable. Avec les jumelle je peux voir que je ne suis pas le seul dans la merde...

18H05 : Bon c'est décidé, je vais tenter d'aller jusqu'à la marina à la voile et mouiller dans le chenal. Je pense que c'est dans mes cordes... Enfin, j'espère. Je vais avoir quelques empannages à gérer et je ne sais pas encore exactement comment je vais faire pour planter la pioche correctement, mais j'ai pas trop le choix. S'il n'y pas trop de courant et de vent, ça devrait le faire. Ça devra le faire.
A moins qu'il y ait du monde sur les pontons extérieurs, mais je préfère ne pas y compter. On verra bien...

Fais gaffe Gwen, ya du monde...
18H40 : Pour l'instant tout va bien. Heureusement, je suis au portant quasiment tout le temps et il semble que ce sot marée montante. Mais je surveille attentivement le sondeur et ma dérive. Je viens de passer au ras d'un cargo mouillé en plein chenal, et il m'a coupé le vent. J'ai cru que j'allais pas pouvoir le passer !

18H45 : Une barque vient de me lancer une amarre ! Je le crois pas ça !



Épilogue :

A la remorque
Je suis désolé mais mon journal de bord s'arrête là ! Car je ne peux décemment pas tenir la barre et écrire en même temps.
Cela dit, je peux quand même vous raconter ce qui se passa ensuite sous un autre mode.
J'étais donc à la remorque de cette barque qui, à force de lui regarder l'arrière, commençait à me dire vaguement quelque chose... De même que les tenues des deux mecs, verte et blanche. J'ai alors réalisé qu'ils venaient de la marina située à plus de trois milles de là ! Quelle chance qu'ils passaient par là ! Vraiment ? Me suis-je dis. Comment ont-ils su que j'étais en avarie moteur ?
Je me posais tout un tas de question, et celle de savoir combien allait me coûter cette balade en remorque n'en n'était pas la dernière. Pendant ce temps là, la sirène qui salue les marins me faisait coucou, et deux flamands roses passaient majestueusement au dessus de la Boiteuse...
Nous avons remonté le fleuve jusqu'à la marina, et la lancha m'a alors déposé comme une fleur, exactement à la même place que l'année dernière.

Ouais c'est ça... Bom dia !
Aussitôt amarré, j'ai demandé alors aux deux types comment il se faisait qu'il m'ait trouvé. Je comprends vaguement (mon portugais est un peu rouillé) que c'est suite à un appel que j'aurais lancé... Et c'est là que j'ai compris. Les gars étaient sorti, non pas pour me ramener moi, mais le bateau qui s'était échoué !!!
J'étais à la fois content et confus. Content d'avoir eu la chance de les croiser, et confus que l'équipage de l'autre voilier ait devoir à attendre encore une heure ou deux avant que d'être secouru !
J'ai rencontré par la suite les malheureux qui ont dû poireauter à cause de moi, et heureusement ils ne m'en tiennent absolument pas rigueur. Pour info, le capitaine qui naviguait solo, était lui aussi sans moteur, faute de gasoil. Il a voulu faire le malin en coupant le fromage et s'est retrouvé sur le sable en un rien de temps ! Il est finalement arrivé une heure trente après moi.

Ouf ! Sains et saufs !
Me voici donc arrivé à Rio Grande do Sul au Brésil. Tout de suite la température s'est faite plus clémente et je n'ai plus à me demander si je dois prendre ma polaire avec moi lorsque je vais faire un tour (j'adore !). Le lendemain de mon arrivée a été consacré essentiellement à deux choses : Dormir et écrire. Dormir c'est pour récupérer de cette navigation quelque peu mouvementée, et écrire c'est pour que vous ayez ce texte sous les yeux le plus rapidement possible, ainsi que pour moi d'évacuer cet épisode afin de pouvoir passer à autre chose.
Parce que maintenant, en plus de trouver des nouveaux winchs, une nouvelle hélice pour le hors-bord et peindre le régulateur, je vais devoir réparer le foc et surtout trouver ce qui a bien pu clocher avec mon vieux moteur... Bref, j'ai du boulot.
Até logo !

On arrive !

mardi 7 janvier 2014

Sacré phénomène !

34°39.214S 54°08.588W
La Paloma, Uruguay, 19H00 heure locale.

Ce n'est pas la première fois que j'ai à faire à lui depuis que je suis dans ces régions... Si mes souvenirs sont bon, ça doit être la troisième. Mais c'est la première fois que j'ai le loisir d'observer un des plus fameux signe annonciateur. Je veux parler du nuage en cigare qui précède un coup de pampero.


Cette espèce de gros rouleau se déplace à très grande vitesse barrant le ciel de sa masse fantastique. Puis, dans son sillage arrive un vent du sud-ouest carrément à l’opposé de celui qui soufflait jusqu'alors. Sur le quai et sur les ponts c'est le branle-bas de combat. On arrime tout ce qui est susceptible de s'envoler, on vérifie l'amarrage des bateaux... Bref, on se prépare à encaisser la toute puissance du pampero. Et lorsque le nuage arrive à la verticale, ça commence... Dix nœuds, vingt-cinq nœuds, trente-cinq nœuds, quarante-cinq nœuds ! En moins de deux minutes on passe du zéro Beaufort à la force 9 !


Celui-ci aura duré moins d'une demi heure. Une demi-heure de stress intense et d'impuissance, où l'on se contente de regarder et d'attendre que ça passe... Des moments où, paradoxalement, je me sens vivant comme jamais.

lundi 6 janvier 2014

Quelques mots

34°39.214S 54°08.588W
La Paloma, Uruguay

Vous savez quoi ? J'avais prévu de mettre les voiles jeudi dernier. Oui, je sais. L'emploi du passé composé, plus le fait que ma position en début d'article n'a pas changé vous indiquent déjà qu'il n'en n'a rien été. Je vous sais accoutumés à mes nombreuses procrastinations, et c'est d'ailleurs bien pour ça que je ne vous en ai pas parlé. Alors, pourquoi vous en parler maintenant me direz-vous ?
Et bien parce que j'en ai envie, d'une part. Et d'autre part, parce que si je regarde un peu les publications de l'année dernière je me dis que ça serait bien si je faisais un peu plus de XX billets par mois. Appelez ça une résolution de début d'année... Pas sûr que je m'y tienne, mais bon, l'intention y est. Enfin, à la vue de tous les gentils commentaires de l'article précédent, je trouve que vous le méritez amplement.

La pêche se fait en famille
Alors c'est quoi mon quotidien en ce moment ? Qu'est-ce qui peut bien remplir mes journées ?
Comme j'ai déjà dû vous le dire, le port de La Paloma est assez éloigné du centre ville. Aussi, étant donné l'état de mes chevilles je ne m'y rends que tous les trois ou quatre jours pour y remplir le frigo et acheter mon tabac. Bon, c'est pas le cas aujourd'hui mais la plupart du temps je fais ça assez tôt le matin pour éviter les grandes chaleurs. La semaine dernière le thermomètre a flirté avec les 40°C pendant plusieurs jours, et je vous jure qu'il ne fait pas bon marcher quand ça tape comme ça. Sinon, la connexion wifi la plus proche se trouve dans les bureaux de la hydrographia, j'y passe deux fois par jour, le matin et en fin d'après-midi, afin de garder le contact avec le monde et télécharger quelques films ou séries (Vous avez vu The Newsroom ? C'est génial!).
Entre deux aller-retours je m'arrête souvent pour papoter avec les promeneurs et les pêcheurs à la ligne qui envahissent le quai dès que le temps le permet. Et comme d'habitude c'est Touline qui me sert de lien avec la population locale... Le spectacle qu'elle offre au quotidien, son bagout, sa sociabilité, font qu'elle attire irrémédiablement l'attention, et cette attention ricoche ensuite sur moi. Je ne compte plus le nombre de fois où j'ai dû raconter la fois où elle est tombée à l'eau en plein océan !

La canne, la pipe, le maté... Je sociabilise !
A force de regarder les pêcheurs qui tous les soirs taquinent le poisson sabre, j'ai décidé de m'y mettre moi aussi. J'ai déjà par deux fois ramené une bête de plus d'un mètre, et ainsi pu ajouter quelques protéines marines à mon menu. Parfois en début de soirée, alors que le soleil se couche, je m'assied sur un banc et je partage un maté avec Eduardo qui vient promener son chien. On discute de choses et d'autres... Bref, je sociabilise (Et non pas je socialise, ne confondez pas ! Faut pas déconner tout de même...).
Comme lorsque je me trouvais a Piriápolis, le fait d'être là depuis quelques semaines, et aussi que je ne me débrouille pas trop mal en espagnol, fait que je m'intègre également auprès du personnel du port ainsi que des quelques propriétaires de voiliers. Tout le monde vient me demander des services ou des conseils ! A moi ! Vous vous rendez compte ?

Tu m'en dois une, toi !
Il est vrai que je ne ménage pas ma peine pour me rendre utile... Vendredi j'ai dû grimper en haut d'un mât et Samedi soir j'ai dû attendre jusqu'à minuit pour aider un type qui rentrait solo d'une virée à Cabo Polonio. Le pauvre a bien eu besoin d'aide après avoir barré douze heures et est arrivé mort de fatigue. Sa novia était folle d'inquiétude ! Le summum de cette implication dans la vie portuaire a été ce dimanche lorsqu'il a m'a fallu sauter sur le pont d'un voilier en perdition qui avait rompu son mouillage et menaçait de se fracasser sur le béton du quai... Je vous passe les détails tant l'histoire est compliquée, mais il y en a un maintenant qui m'en doit une, et pas une petite.

Bon d'accord, toutes ces bonnes actions ne me coûtent pas grand chose je dois bien le dire. A part peut-être en fatigue et en temps. Mais j'aime me sentir utile et cela rempli mes journées. Et puis je me dis qu'à naviguer seul, on a souvent besoin d'un coup de main... Et qu'un jour j'aimerais bien que quelqu'un fasse pour moi ce que je fais pour les autres. Et le meilleur moyen que j'ai trouvé est encore de montrer l'exemple. Quitte à ce qu'on abuse de ma gentillesse, mais franchement cela n'arrive pas souvent.

Aruna et La Boiteuse
Sinon, quoi vous dire ? Je suis actuellement à couple avec un voilier brésilien qui projette de remonter vers Porto Alegre en fin de semaine. Marcio et Alessandra et leurs deux enfants sont carrément adorables ! Touline elle, passe son temps à se faire câliner par les mômes... Bref, comme d'habitude c'est elle qui tire le meilleur parti de toutes les situations.
Nous projetons, mes nouveaux amis et moi, de faire route ensemble jusqu'à Rio Grande do Sul. Départ, normalement, jeudi ou vendredi... Alors il se peut bien que la prochaine fois que je me mets devant le clavier, ce sera sous le soleil brésilien ! Até logo !

Sons et lumières
Leçon de chose
Appâts colorés