lundi 31 mars 2014

Sou um velejador

27°96.471S 48°33.162W
Iate Clube de Santa Catarina, Florianopolis.

Trois ans... Aujourd'hui cela fait trois ans que je suis parti de France. Et la première chose qui me vient à l'esprit au moment de commencer ce texte c'est que le temps est décidément bien relatif. Ces trois années je les ai vécues tellement intensément qu'elles sont gravées dans ma mémoire comme si elles n'avaient été que trois semaines... Et en même temps j'ai quand même conscience que ça commence à faire un paquet d'années. Un petit paquet, mais un paquet quand même.

Trois ans, c'est la deuxième unité de temps du marin voyageur. La première c'est un an. C'est l'année sabbatique que s'offrent (ou se font offrir) certains djeunes à la fin de leurs études. Ou encore celle que le code du travail autorise aux travailleurs pour se ressourcer. C'est une parenthèse, un moment bref d'évasion avant que de retourner se plonger dans les tourments de la vie quotidienne.

Rocher de Gibraltar, juin 2011
 Ensuite c'est trois ans. Trois ans c'est en moyenne le temps qu'il faut pour faire un tour de l'Atlantique à peu près correct sans avoir à cravacher comme un stakhanoviste bouffeur de milles (confère la première catégorie). En trois ans vous faites la boucle en passant par l'Afrique de l'ouest (le Sénégal et la Gambie), l'Amérique de sud (Brésil, Uruguay et Argentine compris). Les Caraïbes en passant par Cuba. Et enfin vous rentrez tranquillou en Europe par les Açores.

Barcelone, Espagne, avril 2011
Après, vous rentrez dans la catégorie open. Celle-ci se décline en deux sous-catégories : ceux qui ne prévoient pas de retour précis mais qui savent très bien qu'ils ne passeront pas leur vie entière à jouer les nomades des mers. Et enfin viennent ceux qui ont décidé de prendre perpète sans trop se poser de questions sur le comment tant ils sont sûrs du pourquoi... Pour ma part je ne sais pas trop à laquelle de ces deux sous-catégories j'appartiens. Seul le temps le dira.

Essaouira, Maroc, juillet 2011
 Bon d'accord, les openistes ne sont pas nombreux si l'on compare à l'immense flotte des bateaux-voyageurs qui parcourent les mers. Ils sont les jusqu’au-boutistes de la mer. Les intégristes, les radicaux du nomadisme. Les poursuiveurs de rêve... Une catégorie à part, un peu arrogante peut-être, mais c'est somme toute normal tant ce qui anime les autres leur semble vain et superficiel.

Lanzarote, Canaries, février 2012
 Lorsque deux bateaux voyageurs openistes se croisent, une des premières questions que l'on pose est celle-ci : Depuis quand es-tu parti ? C'est même plus important que de savoir de quelle région on est issu, ou encore quel métier l'on exerce/exerçait (sauf si tu es toubib, ou mécano diéséliste on n'en a rien à cirer franchement). De la réponse viendra alors le respect, ou bien encore les encouragements et les conseils. Les openistes se reconnaissent toujours. Ils n'ont pas la même lueur dans les yeux, pas la même façon de parler d'eux-mêmes ou des autres. Du chemin qu'ils ont fait ou bien des pays où ils ont vécu. Pas les mêmes bateaux aussi... Bref, comme je vous disais, c'est une catégorie à part à laquelle j'ai l'honneur d'appartenir.

Mindelo, Cap Vert, mai 2012
Trois ans de voyage font de vous un vétéran ou un novice selon la catégorie dans laquelle vous vous situez. Mais j'ai clairement conscience de n'être qu'au début de mon histoire. De l'histoire de La Boiteuse. Cette Boiteuse qui depuis le départ me fait parfois tourner en bourrique, mais qui aussi me procure des joies intenses. Ce bateau qui m'a déjà fait parcourir 9000 milles et fait vivre dans six pays différents. Ce bateau qui m'a fait rencontrer bien plus de personnes que je n'en n'avais croisé pendant les dix dernières années de ma vie de terrien. Cette Boiteuse qui m’emmènera encore très loin... Du moins c'est ce que je souhaite.

Arrivée transat à Jacaré, Brésil, juillet 2012
Pour finir ce petit billet d'anniversaire, chaque fois que je vous parle de la communauté des marins-voyageurs je suis un peu mal à l'aise avec le terme. Je n'aime pas ce mot, construit sans élégance avec un tiret au milieu comme si l'amalgame n'allait pas de soi. En portugais il existe un nom pour parler de nous, un nom qui sonne joliment qui plus est : um velejador. Littéralement il s'agit d'une personne qui voyage en voilier... Il est beau ce nom je trouve... Pourquoi on n'a pas un nom comme ça en français ?

Sou um velejador.

Matariz, Brésil, novembre 2012
La Paloma, Uruguay, janvier 2013
Tigre, Argentine, mars 2013
Pinheira, Brésil, mars 2014


mardi 25 mars 2014

Une semaine à Florianopolis

27°96.471S 48°33.162W
Iate Clube de Santa Catarina, Florianopolis.

Dans la série des déboires inhérents à la vie fantastique du marin voyageur, les problèmes mécaniques sont récurrents. En tous cas ils le sont pour moi. Et si j'en crois ce que je lis sur les blogs, je dois être particulièrement verni dans ce domaine ! Ou alors leurs auteurs passent sous silence les couacs de leurs machines... Je n'en sais rien. Mais j'aime vraiment à croire que je ne suis pas le seul, c'est mieux pour mon moral.
Bref, depuis une semaine au Iate Clube de Santa Catarina - Veleiro da Ilha de Florianopolis (c'est son nom complet), ma situation mécanique s'est améliorée. Mercedes a un démarreur tout neuf maintenant, et démarre presque (oui, presque!) au quart de tour. J'ai maintenant deux batteries de service neuves, et le moteur de Miss B a été révisé et ronronne lui aussi. Presque. Je crois que c'est le carburant qui pour le coup n'est pas casher.

L'auteur au boulot

Beau et rare bâtiment ancien
Puisque tout fonctionne à peu près bien, je ne vais pas tarder à mettre les voiles... Dès qu'une fenêtre à peu près potable se présentera. De plus la ville de Florianopolis (quelques photos en plus sur ce lien) n'est pas suffisamment à mon goût pour que je m'y attarde. C'est trop grand, c'est trop cher, c'est moche... Bref, ça ne donne pas envie. Et puis je vous rappelle que j'ai le compteur qui tourne, tic-tac tic-tac, le visa n'est pas extensible ! D'ailleurs, le serait-il que je ne crois pas avoir envie de prolonger mon séjour au Brésil... Enfin, plus envie serait-il plus juste de dire. Je commence à en avoir un peu marre du Brésil. J'ai envie de changer d'air, et il me tarde de naviguer dans la mer des Caraïbes.

T'as le look coco !

Rue piétonne du centre ville
Les contraintes météo de cette zone (les conditions de merde si vous préférez) sont sans doute aussi pour quelque chose. Cette semaine nous avons vécu un beau coup de vent de quarante nœuds qui nous a obligé, Touline et moi, à rester cloîtrés dans le bateau. J'ai eu une pensée pour le Gwenalys et le Houba qui étaient au mouillage à Pinheira... S'ils n'ont eu qu'un aperçu de ce que nous avons eu ici, ça a dû être plutôt Rock&Roll pour eux !

Que vous dire d'autre ? Ben rien... Je suis plutôt en panne d'inspiration aujourd'hui, vous m'en voyez désolé ! En même temps, je ne peux pas que vous raconter des aventures époustouflantes tous les jours, ça fatigue à la longue.
Até logo !

Spectacle de rue façon Brésil = Capoeira
Iate Clube... Sous surveillance !

Bon appétit ma Touline !

Les deux ponts qui relient l'île au continent.
Figuier (Ficus Microcarpa)

mercredi 19 mars 2014

De Pinheira à Florianopolis

27°96.471S 48°33.162W
Iate Clube de Santa Catarina, Florianopolis.

05H00 : Dans un demi-sommeil, j'entends comme des objets qui tombent. Des trucs rebondissent sur le plancher dans un tintamarre qui n'a rien à voir avec leur poids ou leur volume. Je me dis que je dors, que je rêve peut-être, et je cale ma tête dans les coussins. Puis j'entends roucouler... Là, le rêve s'effrite jusqu'à exploser lorsque retentit un miaulement insistant. Et merde, putain Touline tu fais chier !
Je regarde ma montre. Elle indique cinq heures et des poussières. Je râle pour la forme, parce que ça fait partie du contrat, mais en réalité je suis content. Mon réveil-matin à fourrure a rempli son office. C'est l'heure de se lever car la journée va être longue.

Café, clopes. Je sirote le tout en regardant la lune se coucher. Le soleil ne devrait pas tarder à se lever exactement de l'autre côté. Je rassemble mes pensées tout en écoutant le vent qui n'a pas cessé de souffler de toute la nuit. Je sors l'anémomètre, il indique 10 nœuds, rafales à 15. Pour tout vous dire j'aurais préféré une pétole pour ce qu'on a à faire. Car aujourd'hui je vais quitter l'enseada de Pinheira en le faisant remorquer par le Gwenalys, le dériveur de Martine et Claude. Nous allons aller jusqu'au Iate clube de Santa Catarina, à exactement 17 milles d'ici.

Martine et Claude
C'est Claude qui m'a proposé ça hier, alors que nous venions de passer, impuissants, une heure au chevet de Mercedes. L'idée ne m'avait même pas effleurée, aussi j'ai dû prendre quelques minutes pour y réfléchir... Et puis j'ai accepté parce que c'était la meilleure chose à faire. Ici, je n'aurais jamais pu être dépanné, et tôt ou tard j'aurais fini dans les parcs à huîtres... Donc autant saisir l'occasion, surtout lorsque celle-ci est proposé aussi gentiment.

06H45 : Le soleil bondit au dessus de la Ilha do Papagaio. Je me suis activé pour ranger La Boiteuse afin qu'elle soit prête à naviguer à la voile, au cas où quelque chose se passerait mal. Le vent forci : 15 nœuds, rafales à 20. Fait chier.

07H20 : Je suis prêt. Le début de la manœuvre est prévu pour dans quarante minutes. Gwenalys va passer à côté de moi et me lancer un boute. Puis commencera à me tracter doucement dans l'axe de ma chaîne afin que je puisse remonter mon ancre. Je n'ai jamais fait ça avant (j'appris plus tard que eux non plus), et j'espère ne pas faire de conneries. Je commence à être nerveux... Je vais me faire un maté, ça va me calmer. Ou pas.

07H35 : Il y a beaucoup de vent maintenant... Presque 20 nœuds établis. Ça m'ennuierait un peu qu'on annule, car maintenant que je me suis fait à l'idée, je suis prêt, archi-prêt. Mais c'est Claude le patron sur ce coup-là. Je m'en remets entièrement à son jugement et à son expérience acquise tout au long de ses dix années de voyage.

O7H55 : Appel radio du Gwenalys. C'est bon, on le fait.

Bon, on y va oui ?
08H05 : Gwenalys décroche son ancre. Je me rends à l'avant et commence à remonter quelques mètres de ma propre chaîne.
Puis, tout est allé très vite. Gwendalys est passé sur mon bâbord et m'a lancé vingt mètres de câblot que j'ai rapidement fixé à la patte d'oie que j'avais préparée. Malheureusement, à cause du vent Gwenalys est obligé d'aller assez vite pour rester manœuvrant. Trop vite pour que j'arrive à suivre au guindeau. Mon ancre racle le fond et croche au passage un de ces trucs qui pendouille et où sont les huîtres (je ne sais pas comment ça s'appelle). Mon remorqueur s'arrête alors et je dois forcer sur les bras pour remonter ce qu'il reste de chaîne. Ouf ! Ça y est, je suis décroché ! On peut y aller.

08H35 : Nous quittons l'enseada de Pinheira. Dehors il y a de la houle et du vent, et ça secoue pas mal. 3,5 nœuds de vitesse, tout baigne.

08H50 : Ah ben zut. Chuis malade !

09H45 : Nous avons contourné l'île du Perroquet et nous embouquons la passe pour rentrer dans la baie-sud.


10H30 : Nous ramons... J'avais pensé que nous avancerions à trois nœuds, mais finalement c'est plus près de 1,5... Ce qui va doubler de le temps de la balade.

10H45 : Nous croisons une vedette de ma Marinha do Brasil. Oups !

11H50 : Punta do Cedro. On a fait (en gros) le tiers du trajet. Nous sommes face au vent, à deux nœuds de vitesse. De temps en temps nous communiquons par VHF pour nous demander comment ça se passe. De mon côté je commence à fatiguer car je suis à la barre depuis plus de trois heures maintenant afin de garder La Boiteuse exactement dans le sillage de Gwenalys. A travers la brume de chaleur, j'aperçois notre destination à 10 milles d'ici. La marina se trouve presque au pied du grand pont qui relie l'île au continent.

Midi : Voilà la vedette de l'armée qui repasse dans l'autre sens. Heureusement, nous ne semblons pas les intéresser. Cela me fait penser que de débarquer comme ça dans une marina va probablement me forcer à faire mon entrée officielle dans le pays. Et une fois que ce sera fait, je n'aurais plus que trois mois pour remonter le long des presque trois mille milles qui me restent à faire pour quitter le Brésil. Ouch !

C'est long...
13H25 : Putain c'est long... Je commence à avoir sommeil.

14H05 : De temps en temps arrive un train de houle constitué de deux ou trois grosses vagues qui vient frapper la proue de La Boiteuse. Le bateau bondit alors et retombe en faisant exploser l'élément liquide en une gerbe éblouissante.

14H35 : La ville de Florianopolis s'étale devant nous à contre jour, de chaque côté du bras de mer. Elle m'a l'air énorme cette ville...

15H00 : Message radio de Martine. Plus que cinq milles à faire ! (Yeaaaaah !) Arrivée prévue entre 18H00 et 19H00 (Boooooh !!!). Nous n'avançons plus qu'à 1,5 nœuds.

Et merde...
15H15 : Par hasard, je jette un œil derrière moi et j'avise soudain un arcus de belle taille qui se dirige vers nous. J'avais déjà abordé le sujet avec Martine et Claude lors d'une soirée de papotage... Je leur avais raconté ce Pampero qu'annonce ce gros nuage en rouleau, et des effets violents de celui-ci. Je les appelle pour les prévenir. Eux qui ne connaissaient pas, vont découvrir ce que c'est.

15H30 : Ça y est c'est parti ! Le vent à viré à 180° et souffle de plus en plus fort. 18 nœuds à l'anémomètre de poche. La température a baissé de presque dix degrés. Du coup, puisque nous avons maintenant le vent dans le dos, nous allons plus vite ! 4 nœuds ! Chouette, on va arriver plus tôt !

16H10 : La Marina est en vue. Je commence à réfléchir à comment on va faire pour y rentrer... Et franchement je n'en n'ai aucune idée. Ça va être de l'improvisation totale.

Ça commence à souffler pas mal
16H30 : J'ai réussi à joindre la marina et ils envoient un canot pour nous filer un coup de main. J'suis fier de moi, je me suis débrouillé comme un chef en portugais ! Le souci c'est que le vent ne veut pas baisser... On est toujours à 20 nœuds et la mer se creuse et déferle de plus en plus.

16H45 : Un canot gonflable arrive avec un moteur de 5 CV au cul... Désolé mon pote, mais ça ne va pas le faire. Le gars comprend assez vite qu'il doit retourner au port et revenir avec un botte un peu plus costaud.

La suite ? Et bien il n'y a pas de suite... Il n'y a rien d'écrit sur mon cahier en tous cas, car j'ai été un peu trop occupé pour pouvoir écrire quelque chose. Alors comme la dernière fois vous allez avoir droit à un récit a froid.

Le type a mis un peu de temps à revenir... Et pour cause, au même moment, un voilier français, le Houba de Denise et Jean-Claude, dérapait sur son ancre et venait se fracasser sur les pontons extérieurs. Le temps que le personnel de la marina sauve le bestiau et l'amarre sur un corps mort, Gwenalys et La Boiteuse faisaient des ronds dans l'eau... Dans une mer de plus en plus impraticable.
C'est là que j'ai fais une boulette. La Boulette. Alors que nous passions le lit du vent, je me suis déconcentré une seconde et La Boiteuse s'est retrouvée au travers par rapport au vent. En clair et en image, Gwenalys est parti d'un côté, et moi de l'autre. La ligne qui nous reliait est passée sous ma coque, c'est coincée, et nous nous sommes retrouvé cul à cul dans une mer de plus en plus merdique. Gwenalys était à la peine, et moi je m'agrippais fermement à la barre pour l'empêcher de partir sur le côté. En effet, je recevais maintenant la houle par l'arrière, et le safran prenait des paquets de mer dans un sens pour lequel il n'a pas été conçu.

La cavalerie est là !
Bref, nous décidons de mouiller nos ancres respectives et de larguer la remorque afin de reprendre les opérations dans le bon sens. Manque de bol, la mienne n'accroche pas la vase du fond. Mais alors pas du tout ! Je pars à la dérive, et je vois les piles du pont derrière moi qui se rapprochent à la vitesse grand V. Là, ce n'est plus besoin d'aide dont j'ai besoin, mais carrément d'un sauvetage ! Les appels que je passe sur le canal 16 sont de plus en plus insistants. Je n'en suis pas à lancer un pan-pan-pan... mais presque (En fait, cela ne m'est même pas venu à l'esprit pour tout vous dire).
Au bout d'un temps qui m'a semblé interminable je vois alors arrivé la cavalerie. Pas moins de six personnes réparties sur deux zodiacs dont un assez puissant pour tirer la Boiteuse, ainsi qu'une moto des mers foncent sur moi et prennent les choses en main. Un employé monte à bord et m'aide à remonter mon ancre qui labourait le fond et m'annonce qu'ils vont me mettre sur une des bouées extérieures.
Merci les gars !
Un peu bourrin sur ce coup-là, j'insiste pour qu'ils me fassent rentrer dans la marina, sans me rendre compte qu'avec l'état de la mer l'opération est quasiment impossible (mais que voulez-vous, j'en ai plein le cul, je veux juste que ça s'arrête !).
Mais le type refuse catégoriquement et me dis que c'est la bouée, ou rien. Et que de toute façon la marina est pleine et qu'il n'y a pas de place.
Là, grosse déception... A 18H00, je me suis retrouvé accroché à une grosse bouée avec des amarres pour paquebots, ballotté dans tous les sens et pour parfaire le tout, un orage est arrivé. Genre, son et lumière avec des gouttes capables de remplir des verres à vodka. Du coup, je suis resté pour la nuit sur le bateau, en tête à tête avec Touline qui me faisait une de ces gueules !
Désolé ma vieille... Mais là je n'y suis pour rien.

L'eau du ciel
Le lendemain mardi 18 mars, après avoir dormi presque neuf heures d'affilé, la première chose que j'ai réalisée est que je n'avais plus un watt d'électricité. Mes deux batteries de service étaient vides de chez vides... Pourquoi. Comment ? Je ne sais pas encore. Mais peut-être cela a t-il un rapport avec le fait que mon démarreur refuse de fonctionner complètement. Mais bon, pour l'heure c'est le cadet de mes soucis. Ce que je veux c'est descendre à terre pour prendre une douche et me raser. Moi qui pensais en avoir fini avec les rames, j'allais encore devoir attendre un peu...
Ensuite, je me suis habillé un peu mieux et je me suis rendu aux bureaux de la marina. Le jeune type qui nous reçoit (Martine et Claude étaient avec moi) commence par nous souhaiter la bienvenue et m'annonce que nous disposons de deux jours de courtoisies (en langage marin, ça veut dire gratos). Ça commence bien me dis-je.
Puis il enchaîne et me dit que le prix à la journée est de 100,48 Réals (j'adore les 0,48) soit à peu près 30 Euros.
PARDON ?!?! J'ai sans doute un peu haussé la voix quand j'ai dit ça... Faut dire que le type m'a pris un peu par surprise. Et là il m'explique que nous sommes encore en période estivale, alors c'est plein pot. En avril ça sera divisé par deux. Du coup je me calme un peu. De toute façon je n'ai pas le choix non ? Ce n'est pas comme si je pouvais aller ailleurs avec un bateau sans moteur et sans électricité... Mais finalement c'est peut-être ça qui m'énerve le plus.

Le lendemain, c'est déjà mieux
Puis le gars, vachement sympa au demeurant, me rappelle de ne pas oublier de lui rapporter mes papiers d'entrée tamponnés par la Police Fédérale pour qu'il puisse en faire une copie... Là, je suis coincé. Il va falloir que je me déclare... Le compte à rebours est désormais déclenché. Tic-tac, tic-tac... Plus que 90 jours (88 maintenant).
Et donc dans la foulée l'équipage du Gwenalys et moi avons pris un taxi pour entreprendre la procédure d'immigration. Moi pour entrer au Brésil et eux pour en sortir. Ça nous aura pris la journée, car bien sûr les trois bureaux à voir se situent aux trois coins de la ville.

La Bonne nouvelle du jour, parce qu'il en faut bien une, ce fut que lorsque je repassais au bureau pour leur montrer le document de la police dûment tamponné, le jeune gars m'a annoncé que je pouvais avoir une place à quai dès le lendemain. Et qu'il se chargeait de contacter un mécanicien pour qu'il vienne ausculter La Boiteuse.

Voilà-voilà... Ceci était le récit de ce qui doit être ma navigation la plus courte (19,2 milles) mais certainement pas la plus tranquille ! Aujourd'hui tout va mieux, je suis assis dans mon bateau et je tape ces mots en écoutant Supertramp. Touline est allé à la découverte de son nouvel environnement et me fait de gros câlins... Tout à l'heure je vais aller au bar de la marina m'en jeter un, et profiter d'un super wifi pour mettre à jour ce blog. Bref, les jours se suivent mais ne se ressemblent pas, et c'est très bien comme ça.

C'est pas si compliqué pourtant !

Pêcheur dans la baie de Pinheira

samedi 15 mars 2014

Au mouillage

27°51.095S 48°35.127W
Enseada de Pinheira

Je n'avais pas envie de vous raconter cette première semaine au mouillage. Non, je me disais qu'écrire juste pour me plaindre et vous dire combien je m'emmerde ne devait avoir que peu d’intérêt pour le lecteur. C'est vrai quoi, vous avez sans doute autre chose à faire que supporter la longue liste des choses qui m'ennuient au quotidien et qui font que je déteste toujours autant les mouillages. Et que c'est pas prêt de changer, épicétout.

La Boiteuse à Pinheira

Bref, contentons-nous donc des bonnes nouvelles ! Euh... Attendez, laisser moi le temps de réfléchir... Ah ben non, y'en a pas. Le moteur de la Boiteuse est toujours en rade. Le hors-bord de Miss B aussi (par solidarité sans doute). Il fait un temps pourri un jour sur deux ce qui fait que les panneaux solaires peinent à recharger les batteries usées par les tentatives de démarrages infructueuses. En face du bateau c'est un trou paumé où il faut marcher une demi-heure pour trouver de l'internet ou un supermarché (et pas dans la même direction bien sûr, sinon c'est pas rigolo). Quant à y trouver un mécano, cela relève de la gageure.

Quoi d'autre ? Ah si ! Un autre voilier est au mouillage de l'autre côté de l’isthme. Ce sont des français, Claude et Martine qui navigue depuis dix ans sur un dériveur battant pavillon belge : Le Gwenalys. Ils sont bien sympas mais étant donné la configuration des lieux nous ne pouvons hélas nous voir bien souvent. J'aimerais bien faire le tour de l'île pour aller planter ma pioche à côté d'eux histoire d'avoir de la compagnie, oui mais voilà, sans moteur c'est quasiment impossible. Un atterrissage à la voile c'est cool ok, mais souffrez que je ne m'y risque que lorsque je n'ai pas d'autre choix.

Gwenalys

Bon allez ! Vous savez que ce qui fait mon charme et illumine mon indéniable personnalité c'est que j'arrive à positiver quelque soit le train de merde qui me passe dessus. Et le bon côté des choses, c'est qu'avec les deux kilomètres que je me tape par jour à la rame, plus les quatre autres que je fais à pied quotidiennement, je maigris à vue d’œil !

PS : Last news, Gwenalys a fait le tour de l'île et est venu mouiller à quelques centaines de mètres de la Boiteuse. C'est cool !

Faut que je rentre au bateau, ça se gâte...

mardi 11 mars 2014

De Rio grande do Sul à Pinheira

27°51.095S 48°35.127W
Enseada de Pinheira

Le jeudi 6 mars 2014 – Ça commence très bien !

06H30 : Le jour se lève. Une légère brise souffle de l'Ouest. La Boiteuse décolle tout doucement du ponton en béton du Rio Grande Yacht Club où elle est restée sagement amarrée depuis deux mois. Une fois n'est pas coutume, et étant donné l'heure matinale, je m’abstiens de sonner de la corne de brume pour signaler mon départ. Je passe la pointe, et au passage du ponton extérieur je chope un boute qu'Alain me lance. Ma mission pour la matinée : Remorquer Coco jusqu'à la sortie du chenal. Avec son moteur hors-bord de seulement cinq chevaux, la dernière fois qu'il a essayé, il n'y est pas arrivé.
La ville que nous longeons est à peine réveillée. Le soleil monte doucement dans un ciel sans nuage. La journée promet d'être radieuse. Je suis arrivé à Rio Grande remorqué, j'en repars en remorquant... La vie est parfois facétieuse.

Coco à la remorque
07H30 : On attaque le grand canal avec le vent presque de face. Toute l'utilité du remorquage est là ! Pour l'instant Mercedes semble remplir son rôle... Je n'ose dire que je suis content. On ne sait jamais, les choses pourraient changer ! La bouilloire siffle, c'est le moment de déguster un maté.

07H50 : Nous croisons deux dauphins, énormes et sombres, qui remontent tranquillement le fleuve. Plus que 6 milles, et on sort du chenal.

07H55 : Par pure routine, je viens de jeter un œil à l'arbre d'hélice... Je trouve qu'il vibre un peu plus que d'habitude. Je fais une vidéo au cas où... En même temps, il n'y a pas d'eau qui fuit par le presse-étoupe, c'est déjà ça.

Ça roule !
08H30 : Nous filons 7 nœuds maintenant, et contrairement à ce qu'indiquaient les horaires de marée, le courant est descendant, ce qui nous aide bien. La sortie est droit devant, le vent est de travers... Nous nous consultons Alain et moi et décidons qu'il est temps de couper le cordon. Je largue le boute qui nous reliait, et j'arrête le moteur. Je déroule le génois et La Boiteuse libérée de sa remorque bondit pour fendre l'eau sans vague du chenal. Une bande de dauphins joue sur tribord...

08H55 : Ça y est, nous en sommes en mer. Il n'y a pas l'air d'y avoir trop de vague, la force du courant semble tout aplanir. J'abats progressivement pour prendre mon cap, 55° au grand largue.

09H25 : Je suis aux anges! C'est un vrai régal que de naviguer sur cette mer à peine frissonnante parcourue par ces longs trains de houle... La Boiteuse déroule ces cinq nœuds tranquillou-marylou. Coco est loin derrière à présent, mais ce n'est pas de sa faute car Alain a semble t-il dût changer sa voile d'avant. Je l'appelle par radio pour savoir si tout va bien, mais je n'ai pas de réponse.

09H50 : C'est bon, j'ai eu Alain au bout du fil (enfin du fil... Vous me comprenez!). La mer commence à se former tout doucement. Des petits moutons, à peine des agneaux, apparaissent aux sommets des vagues. On va donc dire qu'on est dans un petit F3, d'ac ?

10H00 : Je n'aime pas trop mon cap, mais bon. Le vent devrait virer au Sud dans les heures à venir et me permettre d'empanner afin de corriger tout ça. Pour cette navigation j'ai fait le choix d'utiliser mon grand Génois léger plutôt que mon petit foc. Je me rends compte que ça doit faire plus d'un an que je ne m'en suis pas servi. Depuis la Transat en fait. J'aime bien mon Génois... Si on ne le maltraite pas, il se révèle presque aussi puissant qu'un spi. C'est pourquoi je ne serais pas contre avoir la même voile, mais taillée dans un tissu plus résistant. Note pour plus tard : Faire faire un devis en arrivant à Trinidad, ou alors chercher une voile d'occasion.

11H10 : Après quelques péripéties, car ce n'est pas une manœuvre que je fais très souvent, je viens de tangonner mon génois. Pas de bol, dans pas longtemps il va me falloir recommencer car je vais devoir empanner... Mais bon, le temps est idéal pour s'entraîner, c'est ça qu'il faut se dire !

Les voiles en ciseau
11H20 : Et allez ! Vent arrière, voile en ciseau ! Je me régale ! Et en plus c'est hyper-confortable, j'en profite donc pour déjeuner de sandwichs à la dinde et d'une crème au chocolat noir. Coco n'est plus qu'un point minuscule sur l'horizon. Bientôt il disparaîtra...

13H00 : Pfff... On se traîne là ! A peine 4,5 nœuds alors que la configuration est idéale. Je relâche le ris que j'avais pris avant le départ mais ça ne change pas grand chose. Ils sont où les 15 nœuds de vent arrière annoncés, hein ?

14H20 : 3,5 nœuds au bon plein... Mon souci c'est que je me suis vachement approché de la côte et je n'aurais pas dû. Maintenant il va falloir que je lofe pour me sortir de là.

16H00 : Je ne comprends vraiment pas ce qu'il se passe. C'est la pétole maintenant ! Je n'ai même plus assez de vent pour me dégager de la côté ! Je suis à deux milles, et bientôt si ça continue, je vais pouvoir compter les grains de sable. J'ai bien envie d'allumer le moteur...

16H20 : J'en ai marre, j'allume Mercedes et je prends un cap au 90°pour m'éloigner franchement de la côte. Touline proteste un peu, et vient se percher au dessus de la descente, non sans me jeter de longs regards furibards ! Touline déteste le moteur ! Elle préférerait être dehors sous la pluie, qu'à l'intérieur quand celui-ci fonctionne.

Un peu de lecture...
17H10 : Pas une ride sur l'eau... c'est désespérant. Le moteur fonctionne normalement, du moins jusqu'à présent. Je n'y peux rien, mais à chaque fois que je me sers de ce moteur, j'angoisse. Non pas que je n'ai pas confiance en lui notez bien, parce qu'il a beau être solide il est quand même assez vieux. Non, c'est en moi que je n'ai pas confiance ! Je suis tellement nul en mécanique que j'ai toujours peur de ne pas savoir quoi faire.

17H50 : Je viens de me faire doubler par un magnifique albatros. Au ras des vagues, sans un bruit, sans un mouvement perceptible... Ces oiseaux ont de la classe.

18H55 : Le soleil se couche alors que je termine de manger. J'ai décidé de rester au moteur au moins encore deux heures.

20H00 : dernier point de la journée : 31°43.978S 51°16.496W, F0, Mer belle, visibilité moyenne, cap au 55°, vitesse 5,5 nœuds, loch = 6430,7.

Le vendredi 07 mars 2014 – Une belle journée

05H30 : La nuit a été calme. Enfin, si on peut dire. Le moteur et le pilote électrique m'ont bien aidé pour avancer jusqu'à une heure du matin. Puis j'ai arrêté Mercedes, car une petite brise soufflait par tribord arrière... Bof, pas grand chose mais suffisante pour avancer à 3,5 nœuds. Le génois battait l'air de temps en temps. Pour bien faire j'aurais dû le tangonner, mais bon... Pas envie d'aller jouer au con sur le pont en pleine nuit sans en être strictement obligé. Quelques bateaux de pêche m'ont obligé à rester vigilant, plus la Touline qui n'a pas arrêté de miauler pendant toute la nuit... Bref, une nuit en mer quoi.

06H00 : Le jour se lève et c'est l'heure du bilan de la nuit. 46 milles de fait depuis hier au soir 20H00, 111 milles depuis mon départ. On va dire que c'est honorable. Mais il va falloir quand même que je m'active un peu si je veux garder le rythme. Allez, je vais aller tangonner ce satané génois !

06H10 : Ayet ! Je commence à maîtriser le truc, hein ? Rho... Faut que je vous dise que pendant que je m'activais à l'avant, j'ai dû pousser une gueulante. Car, alors que je venais de passer l'écoute dans la pince du tangon, et que je m’apprêtais à border le hâle-haut (un peu de technique ne nuit pas), je me retourne et qui je vois juste derrière moi ? Touline bien sûr !
Grrrr... Je pensais qu'elle avait enfin compris, et que je pouvais me dispenser de l'enfermer pendant les manœuvres, et bien il semblerait que non !

 

09H45 : La matinée s'écoule sans rien de particulier. Je passe mon temps entre lecture et somnolence. Seuls le grincement des drisses et le battement du génois perturbent de temps en temps le fond sonore de l'eau en mouvement.
La Boiteuse continue son petit bonhomme de chemin, sans cahots ni surprise. Un bip-bip se fait entendre. Qu'est ce que c'est ? C'est rien, c'est juste Touline qui vient de débrancher le GPS.
La routine d'un navigateur solitaire avec son chat...

10H10 : Je n'arrive pas à me rappeler si je vous ai parlé de mes projets à moyen terme, ou non... Si ? Non ? Peut-être à certain et pas à d'autres ?
Bon ok, alors voilà en gros le plan pour les mois qui viennent. Je compte remonter tranquillement les côtes brésiliennes, à mon rythme, et je pense que je quitterai ce pays vers le mois de juin ou de juillet. Puis, direction Trinidad où je prévois de faire une grosse escale technique en profitant du duty free. Installer une vraie éolienne, trouver une autre voile d'avant, installer de vrais chiottes, un frigo qui marche... Bref y'a du boulot.
Puis, ce sera le Venezuela et la Colombie, et enfin je pense arriver au Panama pour les fêtes de fin d'années. Ensuite... Et bien ensuite on verra.
Bien sûr ce plan n'est qu'une trame, vous vous doutez bien. Les choses peuvent être amenées à changer selon mes humeurs profondes, voire même pourquoi pas, des rencontres.

Ben quoi ?

10H30 : Ah oui ! Il y a autre chose que je ne vous ai très certainement pas encore dite. C'est que la prochaine escale à Porto Belo se fera au mouillage. Et vous savez combien j'adooooore les mouillages !
Mais bon, je n'ai pas trop le choix. Un, les prix des marinas entre ici et là-bas sont prohibitifs. Et de deux, je vous rappelle que j'ai omis de faire ma déclaration d'entrée dans ce grand pays qu'est le Brésil... Donc, au moins jusqu'à Angra dos Reis, la Boiteuse doit se faire discrète !

10H50 : Héhéhé ! Ça commence à devenir sympa ! 6 nœuds, les voiles en ciseau ! La Boiteuse ne roule pratiquement pas pour peu que je reste immobile. Un vrai bonheur !

12H00 : Le vent a un peu baissé mais ça reste correct. J'ai mangé et maintenant je vais aller faire dodo.

13H35 : Je n'arrive pas à dormir... Je repense au film « En solitaire » avec Cluzet. Outre le passager clandestin qu'il se trimbale, ce type passe quasiment tout le temps du film au téléphone ou sur Skype. Vous avez remarqué ? Alors que moi non. Moi je dis ça, je dis rien...

Salut !
14H45 : Arf !! Je suis mort de rire ! Alors que je croise d'assez près un bateau de pêche, nous nous saluons de la main comme il est d'usage entre marins civilisés. J'agite mon bras, un type sur le pont me répond en agitant le sien. Je lève le pouce, lui aussi. Et puis je m’apprête à passer à autre chose, lorsque je vois le type continuer à agiter le bras, mais cette fois-ci avec quelque chose au bout. Tiens, il est vraiment sympa me dis-je, tout agitant à mon tour mon chapeau.
C'est alors que je réalise que le type en question désigne de se son autre main ce qu'il a au bout de la première (vous suivez?), c'est à dire un poisson !
Je réponds, hilare, par un grand geste de dénégation. Le type jette alors son poisson sur le pont et vaque à ses affaires. On est à 40 Km des côtes, et je viens de vivre un de ces moments qui font que j'aime ma vie. Sans un mot, la solidarité des gens de mer s'est exprimée dans ce qu'elle a de plus simple, mais en même temps de plus beau.

15H50 : Le vent vire tout doucement au sud-est. Je l'accompagne en tournant toutes les heures la molette de mon régulateur d'allure et en ajustant les voiles. Je sais bien que par ici il ne faut pas trop se fier aux prévisions météo, mais le fait est que depuis mon départ celles-ci ont tout faux. En fait je navigue à l'aveugle et je dois m'attendre à tout. Le moins bon comme le meilleur, comme lors de ma transat.
Je sais par contre une chose, c'est que tôt ou tard l'anticyclone reprendra ses droits et que je vais me retrouver avec du vent fort dans le pif. C'était « prévu » pour lundi, mais bon... On verra bien. Si c'est trop chiant, je pourrai toujours à l'enseada de Pinheira, à 60 milles au sud de mon atterrissage. Allez la Boiteuse, fonce !

16H45 : Ah, c'est beaucoup mieux ! J'espère que tout va bien pour Alain et Graziela... Logiquement ils devraient avoir les mêmes conditions, alors je n'ai pas de raison de m'inquiéter.

Allo ?
18H40 : Le soleil disparaît peu à peu, et je dois endosser une petite laine. Oh, pas grand chose. Une simple polaire et des chaussettes suffiront. J'ai une pensée pour Hughes et Caroline qui sont partis hier d’Ushuaïa pour aller faire une balade dans les, je cite, gla-glaciers ! Ici, c'est 30° de latitude sud... Encore sept de moins et je replonge sous les tropiques !

18H50 : Oups ! Un coup d’œil au compas et je me rends compte que le vent a encore tourné à l'est de 20°. En moins de temps qu'il ne faut pour l'écrire, je suis à l'avant et m'applique à dé-tangonner ma voile. Un petit tour de molette sur le « piloto de viento » et hop, nous voilà presque par le travers.
Tant mieux, cela ne me disait rien de garder le tangon pendant la nuit de toute façon...

19H00 : Pendant que les pâtes et les saucisses cuisent, Touline pète un câble et décide de foutre la merde. Mais le Capitaine (c'est moi) est intraitable, et la sanction tombe immédiatement. Ce sera port du harnais d'infamie et de la laisse jusqu'à l'extinction des feux ! La bougresse proteste de son innocence, mais le jugement sera appliqué avec fermeté !

20H00 : Dernière vérification du cap, un tour d'horizon pour juger de la présence d’importuns, je sors le duvet et je m'installe pour la nuit. Touline est enfermée à l'intérieur, et moi allongé dans le cockpit, les yeux dans les étoiles. C'était une belle journée finalement.

Le samedi 08 mars 2014 – Ça se complique

06H00 : Quelques gouttes de pluie pour commencer la journée. A votre avis c'est un bon ou un mauvais présage ? J'en ai rien à battre de toute façon, je ne crois pas aux présages. Tout ce que je vois c'est qu'on attaque cette troisième journée de mer après une nuit somme toute assez tranquille. Pas un chat à l'horizon, pas un cargo, pas un pêcheur, rien. Par contre, et là c'est moins drôle, le vent est tombé vers 23H30 après avoir continué à virer est, puis nord-est. A 02H30, j'ai dû allumer le moteur, et nous y sommes encore. Je râle déjà en pensant aux bidonnages qu’il va falloir que je me tape pour remplacer tout ce carburant consommé...

Même sous un grain c'est joli
J'ai perdu un peu de temps cette nuit avec cette pétole. Un peu beaucoup même. Je crois que c'est râpé pour une arrivée dimanche en fin de journée... Il reste 180 milles à faire, et à moins de cravacher du feu de Dieu, c'est loupé. Pas grave, une nuit de plus ou de moins qu'est-ce que ça peut foutre, hein ? Ce n'est pas comme si je devais être au boulot avant la fin du weekend !
En tous cas, le lever du soleil sous la pluie est splendide.

06H35 : A travers la brume je distingue la terre à 17 milles de là. Je vois des montagnes... Cela fait plus d'un an que je n'ai pas vu un relief aussi prononcé. J'aime bien.
Le ciel est couvert jusqu'à l'horizon. Je repense à ce proverbe gaucho qui dit « Nordeste chuva, sul-est limpia ». Si il a raison, quand le vent se lèvera je vais l'avoir dans le nez.

07H50 : Je repense à l'option Pinheira... Le problème avec Pinheira, c'est que l'ancrage se fait assez loin du rivage (je n'ai toujours pas pu remplacer l'hélice de mon hors bord), et que c'est assez rouleur par vent de secteur nord. Il me faudra donc choisir de mouiller du côté nord de la baie pour être à l’abri. M'enfin, on n'y est pas encore. Je choisirai cette option que si je n'arrive pas à joindre Porto Belo pour une raison ou pour une autre.

08H25 : On se fait chier... Chaque heure qui passe je me dis que la mer ne pourra jamais être plus plate. Et bien si, c'est possible. Même la vieille houle des derniers jours semble avoir disparue, écrasée par le poids de l'air et des nuages.

09H45 : Il faudrait peut-être que je me calme sur le maté. Je dois en être à deux litres depuis ce matin. Que voulez-vous, autant en escale j'en bois assez peu, autant en mer c'est devenu ma boisson principale.
Comme la plupart des gens, lorsque j'ai découvert le maté (que l'on appelle chimarrão ici au Brésil), j'ai été un peu surpris. C'est amer, ça ne ressemble en rien à ce qu'un européen peu connaître... Bref, ça a le goût de l'herbe sèche que vous suçotez les soirs d'été. Par contre, si le goût n'a rien d'extraordinaire, au bout de quelques bols vous commencez à sentir qu'il se passe un truc dans votre corps... D'abord c'est diurétique, donc envie de pipi. Et puis c'est un stimulant comme le thé ou le café, mais sans en avoir les inconvénients. C'est riche en antioxydants, et mon foie adore ça ! Perso, je sens comme si des doigts invisibles maintenaient mes paupières ouvertes...

Cela dit, je reconnais que le fait de boire du maté dans sa calebasse et avec sa pipette (la bombilla) aide à faire paraître cette boisson encore plus mystérieuse et plus... Comment dire ? C'est comme la différence entre fumer une clope et fumer la pipe. Il y a également une part de rituel dans tout ça. Il ne s'agit pas de jeter simplement de jeter un sachet dans de l'eau chaude, si vous voyez ce que je veux dire.

11H35 : Entre deux averses j'ai réussi à transvaser 20 litres de gazole dans le réservoir principal. Ça fait huit heures de moteur en plus... Il m'en reste encore quarante, mais franchement ça me ferait mal de les utiliser. J'espère que le vent va revenir d'ici là.

12H00 : Bon allez, j'arrête le moteur. On va bien voir ce que cela donne... Pour l'instant, 3,5 nœuds au bon plein. Je relâche le dernier ris, et de suite la vitesse augmente. 4,5-5 nœuds, ça gîte un peu mais c'est parfait.

14H15 : Ça dépote mon pote ! La Boiteuse trace sa route, toujours au bon plein, dans une mer pas encore formée. J'ai dû réduire un peu la voilure pour diminuer la gîte. De nouveau le ciel se couvre. J'entends le tonnerre gronder au loin vers la côte.

15H30 : Voilà deux heures que la Boiteuse fend les flots vent debout. Bon plein d'abord, puis au prés, elle avance maintenant à six nœuds de moyenne. On irait un bateau de régate !

Mon dilemme, et je pense que ce doit être celui de tous les marins à la voile, est le suivant : je me dis qu'il faudrait peut-être, sans doute, que je réduise la voilure pour éviter de casser quelque chose... Seulement voilà, s'il faut cette risée va s'arrêter dans vingt minutes et j'aurais fait tout ça pour rien. Mais à l'inverse, ça pourrait tout aussi bien empirer !
C'est là que je me souviens de ce que mon amis Philippe m'a dit un jour : Si tu te poses la question de savoir si tu dois prendre un ris ou pas, fais-le. Il est peut-être déjà trop tard.
Bon ok, j'y vais.

15H45 : Et voilà, c'est fait. C'était assez mouvementé, mais pour une fois j'ai mis mon gilet et je me suis attaché. On va presque aussi vite, mais je sens déjà mieux le bateau. Il est moins fougueux.

16H00 : J'ai bien fait de réduire. Il y a un orage qui m'arrive droit dessus.

16H15 : Un petit peu d’ambiance ça vous dit ?


16H50 : Ça y est, l'orage est passé mais il pleut toujours et le vent semble vouloir tourner au nord, ce qui n'arrange pas mes petites affaires. Je vais peut-être devoir virer bord sur bord, parce que dans 30 milles je dois passer le cap Santa Marta. Et j'aimerais assez mettre un peu de distance entre lui et moi.

17H55 : Je suis en train de lire quand soudain un éclair aveuglant m'éblouit. Moins d'une seconde plus tard un claquement sec, énorme et fracassant me fait bondir de mon banc. J'ai le cœur qui bat la chamade ; le poil hérissé comme celui d'un chat... Houla, il n'est pas passé loin celui-là ! Quand je pense que j'ai un machin en métal de dix mètres de haut, juste au dessus de ma tête... j'en frissonne.

18H00 : Je vire de bord pour m'éloigner de cette foutue côte. Cap au 130°... Putain, on n'est pas arrivé. Face à la houle sous voilure réduite, la Boiteuse est à la peine. Il faudrait que je lâche le ris que j'ai pris tout à l'heure pour bien faire... Mais non. Je ne sais pas ce qui m'attend derrière, et en plus la nuit ne va pas tarder à tomber. Je sens qu'elle va être longue celle-la !

18H40 : Le vent tombe, et avec moins de deux nœuds dans les vagues je me fais brasser. Et si j'allumais le moteur ? Parce que là, je recule mine de rien ! Il me reste à peu près pour 36 heures d'autonomie. Je peux sans doute me le permettre.

19H00 : Bouh... Quel bordel mes aïeux !
Je ne vous dis pas la suée que je viens de me prendre. Imaginez le moteur qui démarre avec difficulté, puis qui refuse d’accélérer lorsqu'il est en prise. Tout ça parce que la tirette de l’étouffoir n'est pas assez enfoncée. Le temps d'ouvrir le moteur et de pousser le bitoniau à la main, voilà la bouilloire qui se met à siffler, plus une série de super éclairs et le tonnerre qui va avec, plus un virement de bord sous une pluie battante, plus Touline qui ne sait plus où se mettre hormis dans mes jambes... Bref, je suis à la fois en nage, trempé et énervé ! Et en plus j'ai faim.

Bon. Cap au 40°, 4,5 nœuds avec la GV en appui. Je laisse déjà derrière moi ce putain d'orage, ensuite on verra...


Le dimanche 09 mars 2014 -Sur le fil du rasoir

06H10 : La nuit a été compliquée... Pendant la soirée, je me suis échiné à essayer toutes les combinaisons possibles afin d'améliorer à la fois ma vitesse et mon cap. Je voulais absolument passer le cap de Santa Marta avec suffisamment de marge (10 milles) pour éviter les surventes inhérentes à ce genre de relief. Sous la pluie la plupart du temps, j'ai tout essayé. Moteur + GV + tel cap au près serré, moteur + GV + Génois ¼ + tel cap, etc... Rien n'y fit.
J'ai finalement laissé tomber ma recherche d'absolu lorsque vers minuit le vent a finalement viré plein nord, ne me laissant d'autre choix que de le serrer au plus près.
Vers trois heures du matin, j'ai pu enfin prendre une route directe, toujours au moteur et sous une pluie battante.
Maintenant ça va mieux. Sur bâbord je peux voir la côte, peu ou pas de nuage dans le ciel. La mer elle même semble s'être calmée... Mais j'ai toujours le vent dans le nez.

06H30 : Bon, j'ai tourné et retourné le problème dans tous les sens, mais je pense que je vais finalement m'arrêter à Pinheira. D'abord parce que ce n'est qu'à 35 milles maintenant et que Porto Belo est encore à 90 milles. Dans ces conditions, et si je suis toujours obligé d'utiliser le moteur, je n'aurais alors pas assez de carburant pour y arriver. A moins bien sûr qu'un hypothétique vent du sud vienne m'aider... Mais c'est quasiment improbable. Pas avant plusieurs jours en tous cas.
Côté nord de la baie de Pinheira, je serais alors à l'abri des vents dominants et de la houle, je pourrais ainsi reprendre mon souffle avant que de repartir pour une petite nave tranquille de 60 milles. Allez, on fait comme ça.

07H00 : Mercedes ronronne depuis douze heures d'affilé maintenant. Je suis content, je crois que j'ai pris la bonne décision. Non pas parce que cela me dérange de passer une journée ou une nuit de plus en mer, non ce n'est pas ça. C'est tout simplement la décision la plus raisonnable compte tenu des circonstances. Après, est-ce que je vais trouver de quoi me ravitailler en bouffe et en carburant, et plus important, est ce que je vais trouver un endroit avec du wifi ? On verra bien.
Vous savez quoi ? J'ai hâte d'essayer ma nouvelle ancre Delta de 15 Kg toute neuve !
J'aperçois la pointe sud de l’île de Santa Catarina, droit devant à 30 milles.

07H15 : J'ai vu un gros poisson sauter au loin. Et si je mettais ma ligne de traîne à l'eau ? Qu'en penses-tu Touline?Cela fait plus d'un an que l'on n'a pas fait ça... Allez, go !

Touline qui a passé sa nuit sous la capote me regarde faire avec intérêt pendant un instant puis reporte son regard sur ce qui est vraiment important pour elle à cet instant. La terre toute proche. La pauvre ! Si elle savait que nous allons au mouillage et pas dans une marina ! Je sens que je vais avoir droit à une scène de ménage ce soir...

Content !
07H45 : Et bien ça n'a pas traîné ! Et une petite thonine, une ! La première de ma vie qui plus est. Cela me fera mon repas du soir !

08H00 : Le vent se renforce. F3, toujours plein nord. Mon choix était le bon.

08H15 : Et de deux ! Avec celle qui c'est décrochée cinq minutes avant, le score est donc de : Gwendal : 2. Thonines : 1.

08H40 : Frégate dans le ciel ! Cela veut dire qu'on est enfin sous des latitudes plus clémentes !

08H42 : Gwendal : 3. Thonines : 1.

09H10 : Gwendal : 4. Thonines : 1. On va peut-être s'arrêter là, non ? Touline et moi avons suffisamment de quoi manger, je range donc la ligne.

C'est comme une broche vivante
09H45 : Bon allez, plus que quatre ou cinq heures et nous sommes arrivés. Depuis ce matin, j'ai un superbe papillon de nuit qui orne la capote de la Boiteuse. C'est très décoratif !

10H00 : Correction, on devrait arriver dans trois heures.

11H00 : L'ile da Coral est juste devant moi à cinq milles. Je passe à droite ou à gauche ? Allez, à droite côté océan. Autant ne pas prendre de risques inutiles.

12H20 : Oups ! J'ai eu un petit souci là... Alors que je m'approchais de l’île par le sud, le moteur a commencé à tousser au détour d'un tangage un peu violent. Quelques secondes plus tard, rebelote. Après un instant d'hésitation je comprends ce qui se passe : Je suis en train de tomber en panne de gazole !
Je mets La Boiteuse à la cape, moteur au point mort, et fonce alors remettre vingt litres du précieux liquide dans le réservoir principal. Les brisants de l'île sont dangereusement proches. Je fais le plus vite possible... Quelques minutes plus tard c'est fait. Et sans rien renverser en plus.
Comment ai-je fait mon compte pour me tromper comme ça dans les calculs de ma consommation ?

Ce qui suit a été écrit a posteriori. Vous allez comprendre aisément pourquoi.

12H40 : Alors que je pensais le problème réglé, Mercedes tousse de nouveau. J'ouvre le capot du moteur pour appuyer sur la pompe à injection histoire de le relancer. Cela semble fonctionner... Mais au bout de quelques secondes, même en étant au point mort, le moteur s'étouffe.
Bon, je n'ai pas le temps de m'occuper de ça maintenant. Les brisants de l’île sont proches, vraiment très proches. Je prends donc la barre et tente de m'éloigner en tirant un bord de près ultra-serré. Le vent monte encore, les vagues sont de plus d'un mètre et l'eau explose sous la quille non sans m'asperger au passage. Alors que je barre mon bateau par 15 nœuds de vent sur une mer formée, j'essaye aussi de réfléchir à ce que je vais faire. Je suis bon pour une arrivée au mouillage, à la voile comme les anciens, dans un coin que je ne connais que pour l'avoir vu sur une photo satellite. Dit comme ça, je sais que ça fout un peu les jetons. Et c'est normal parce que je les ai un peu...
Non pas que je ne sache pas comment faire (ça m'est arrivé une fois, avec deux fois moins de vent et cinq équipiers pour manœuvrer sous mes ordres), mais étant donné la configuration des lieux, j'ai intérêt à ne pas me louper. Mais nous n'y sommes pas encore. Pour l'instant je dois réussir à passer cette fichue île de merde, puis les rochers qui protègent l'entrée de la baie. Il me faudra virer de bord quatre fois pour enfin arriver à prendre un cap correct.
La Boiteuse déboule dans la baie à six nœuds au près serré. Déjà la houle et les vagues se calment un peu, mais le vent lui souffle toujours aussi fort. Même un peu plus j'ai l'impression, à cause du relief. J'avise le plan d'eau... Bordel, y'a du monde. Deux gros cailloux sur la droite, et deux bateaux de pêche mouillés, ainsi qu'une vedette de la Marinha do Brasil. Tant pis, je passe au milieu.

J'avance toujours au près serré, mais j'ai réduit le génois à un strict minimum tout en me tenant à la limite du déventement, prêt à me mettre face au vent afin d'arrêter le bateau dès que le sondeur indique quatre mètres de fond. Ce que je n'avais pas prévu, ce sont tous ces bidons qui flottent à la surface... Bordel, c'est quoi ça ? Des parcs à huîtres ! Je les avais oublié ceux-là !
J'avance doucement maintenant. Un coup de barre à droite, un coup à gauche... La Boiteuse progresse en zigzag, pratiquement le nez au vent. Le sondeur indique toujours cinq mètres, mais les premiers bidons se rapprochent. A quarante mètres de la première rangée, je me lance. Je me mets le nez au vent et je bloque la barre. Puis, j'enroule précipitamment ce qui reste du génois (Touline dégage de là !), et je choque la Grand voile en grand. Le bateau continue doucement sur son aire pendant que je me précipite à l'avant pour décrocher l'ancre et balancer 15 mètres de chaîne d'un coup... Le bateau recule, la chaîne se tend, je déroule tout ce que j'ai jusqu'à ce que mes quarante mètres de chaînes reposent au fond de l'eau. Ouf ! Je suis arrivé !

Enseada da Pinheira

Puis ce seront les interminables minutes pendant lesquelles je suis assis à l'avant du bateau, Touline entre les jambes, en train de surveiller mes points de repère et vérifier que l'ancre a bien crochée... La vedette de la Marinha do Brasil me passe sous le nez. J'ai eu un peu peur que ma manœuvre, un peu à l'arrache il faut le dire, ne les attire, mais il semblerait que non. Des jets-ski bourdonnent autour de moi, pas mal de vedettes à moteurs, un kite-surf profitent de cet endroit qui reste venteux, mais quand même protéger de la houle extérieure.
Je suis crevé et j'ai faim. Touline miaule sans s'arrêter depuis que j'ai jeté l'ancre et que je l'ai détachée. Elle voudrait descendre... Moi aussi. Pour la calmer je lui donne un des poissons de ce matin, dont elle avale la moitié en quelques secondes.
Pour l'instant j'ai un peu le cerveau en compote à cause du stress, mais il va quand même falloir que je m'organise. Et puis aussi, va falloir que je plonge le nez dans mon moteur...


Une dernière chose. En milieu de matinée, sur mon cahier à spirale, j'ai commencé à écrire une phrase que je n'ai volontairement pas voulu finir. Par superstition peut-être, ou parce qu’il était trop tôt pour mettre un point final à cette histoire.
Ça disait : « Depuis ce matin, je me retiens de le dire mais je suis fier de... ». C'est bien évidement de mon moteur dont je voulais parler. Lui qui aura fonctionné sans à-coup pendant plus de vingt-quatre heures.
Cela dit, une fois n'est pas coutume, j'ai envie de reprendre cette phrase à mon compte. Sur ce coup-là, j'avoue, je suis assez fier de moi.

Pas mal... Mais un peu miné devant !

Un repos bien mérité...